Sortie du 9 octobre 2022 : une escapade dans l’Eure
Sous un beau soleil d’automne, nous sommes 46 participants organisés en covoiturage à mettre le cap sur notre premier lieu de visite : le Château Manoir de l’Ecureuil au nord-est de Rugles.
Madame Crépy, la propriétaire, nous accueille sur l’esplanade de la façade sud. Les participants admirent d’emblée ce coquet manoir à taille humaine, très bien entretenu.
Façade sud du Château de l’Ecureuil
Celui-ci présente un corps de logis central, rectangulaire, flanqué sur sa gauche d’une superbe échauguette dont la toiture est constitué de bardeaux bois.
La tour XIXème et L’échauguette
Madame Crépy nous donne un aperçu de l’historique de son domaine. :
Existant dès la fin du XIème siècle (Comtes de Leicester) c’est ensuite la famille de Coustes (dont un membre fut le page de Jeanne d’Arc) qui le possède jusqu’au XVIème siècle à une petite interruption près : Jean Le Mercier en 1382 ; puis différents propriétaires se succèdent.
En 1622 la Seigneurie de Rugles donne le domaine à bail à Taurin Fucher qui l’acquiert en 1633 et fait creuser les douves l’année suivante. Sa fille vend ensuite le manoir à Monsieur de Bardouil en 1669. Puis Monsieur Dujardin en 1785 le vend à Nicolas François Victor Chevrier qui le gardera jusqu’en 1843. Ce dernier prend le titre de « Seigneur de l’Ecureuil » en 1793 mais dut très vite faire disparaître toute preuve de noblesse….
Le manoir était en piteux état menaçant de s’écrouler sur ses habitants. Aussi Monsieur Chevrier entreprit de gros travaux de restauration respectant le style Louis XIII tel qu’on peut l’admirer aujourd’hui.
Façade nord du Château de l’Ecureuil
Vendu en1843 à Etienne-Noël Leblond-Bigot, ce dernier rénove la façade nord en harmonisant son style avec celui de la façade sud, lui donnant également ce bel appareillage en losanges. La façade Est sera remaniée vers 1900.
Plusieurs propriétaires se succèdent encore jusqu’au Baron Louis de Cabrol qui vendit l’Ecureuil au grand-père de Madame Crépy en 1948.
Nous faisons le tour du manoir : façade ouest d’où l’on voit bien les douves puis façade nord qui donne sur un beau jardin (fruitier principalement), agrémenté de magnifiques sauges rouges qui rehaussent l’édifice.
Ce joli manoir, bien que restauré à différentes périodes laisse une impression d’unité, de cohérence générale, très agréable à l’œil dans son écrin de verdure.
Nous remercions Madame Crépy pour sa disponibilité et ses explications.
Nous reprenons les voitures pour la poursuite de notre promenade.
Une pause-café à l’auberge « Le grand pré » à Gouville où nous attendent ses propriétaires dynamiques, est la bienvenue.
Nous n’avons plus que quelques kilomètres à parcourir pour atteindre le Château de Chambray où madame Raimbourg, notre guide va nous faire la visite du domaine.
Nous la retrouvons devant ce majestueux et imposant château.
Vue générale du château de Chambray
Nous commençons par un diaporama qui nous raconte l’histoire de plus de 9 siècles d’une terre en bordure de l’Iton qui n’a appartenu qu’à une seule famille : les Chambray.
Ils sont de noblesse normande et comme telle attachés à la préservation du patrimoine familial.
Il y eut 4 châteaux successifs :
Le premier vers 1120, sûrement simple fortin sur une motte près du colombier et à l’ouest du château actuel. Il avait une vocation stratégique de surveillance des points de passage sur la rivière entre Verneuil et Evreux.
Simon 1er construit le deuxième château, forteresse féodale en pierre, à l’Est de l’édifice actuel. Un donjon et des tours rondes ainsi qu’une chapelle dédiée à Saint Laurent sont mentionnés dès 1239 .
Après la guerre de cent ans un troisième château radicalement différent voit le jour entre le fortin d’origine et les ruines du 2ème château. Il est au goût de la noblesse de l’époque, conserve un aspect défensif mais le confort y est accru.
A l’Ouest se trouve la poterne, avec ses deux tours, encore visibles de nos jours.
A l’Est le nouveau logis spacieux contenait 16 chambres.
Au nord le bâtiment accueille de vastes cuisines sur des soubassements en granit.
Château de Chambray au XVème siècle
Vers 1490 une nouvelle chapelle est bâtie dans la cour au même emplacement, en pierres blanches avec une statue de Saint Laurent en façade.
Le décor de la demeure XVème est embelli au début du XVIème par Nicolas de Chambray et son épouse Bonaventure de Prunelé. Ils apposent sur la façade leurs armoiries et leurs bustes sculptés en haut relief.
La chapelle dédiée à Saint Laurent
Buste sculpté en haut relief
En 1590 leur fils Gabriel qui exerce plusieurs fonctions honorifiques à la cour d’Henri III et qui a pris le titre de Baron voit sa fortune augmenter considérablement par les dots de ses deux épouses successives. Il décide de construire un logis plus luxueux, plus spacieux édifié au-dessus de l’ancienne aile basse des cuisines. Il est construit en briques orange alternant avec des pierres de taille (corniches, bandeaux, encadrements de fenêtres) ; son toit à 4 pans est couvert de tuiles. Le projet ne sera pas mené à son terme de son vivant.
S’en suit la démolition du château XVème et l’extension vers l’Est du dernier bâtiment construit.
Château de Chambray au XVIème siècle
La poterne conservée devient le chartrier (conservation des archives familiales).
Pour dégager la vue sur le parc, où se déploient de grandes perspectives rayonnantes, les courtines Sud et Ouest sont supprimées.
Nicolas François de Chambray (1675-1750) à la cour de Louis XIV devient le premier marquis de Chambray. Sa vie est bouleversée par la mort de son fils de 18 ans. Il se retire à Chambray et vivra désormais dans la chartreuse construite dans le parc en 1740.
Déclaré Bien National en 1791, la château et ses 400 ha sont vendus à une centaine d’acquéreurs. Le domaine est reconstitué en 1803.
Entre 1870 et 1885 sous Jacques -François de Chambray le château prend sa forme définitive. Les toitures en tuiles sont remplacées par de l’ardoise.
Jacques -François de Chambray, surnommé « Le grand Veneur » féru de chasse à courre et connu dans l’Europe entière totalisera 2466 cerfs à son tableau de chasse. Pour le 1000ème abattu lui fut offert ce magnifique cerf en bronze qui trône toujours devant le château.
Aspect définitif du château de Chambray
Le cerf en bronze
Jacques -François de Chambray meurt en 1910 sans descendance directe. C’est son neveu Simon marié à Sidonie Ordent qui hérite du titre et du domaine. Leur seul fils Edouard sera tué à Jauche en Belgique le 13 mai 1940. Simon et son épouse décident alors de léguer en 1945 le domaine à l’Etat avec l’objectif de créer un centre d’enseignement et de recherches agricoles. Classé IMH depuis 1972 il appartient désormais à la Région.
Après cet intéressant développement historique nous progressons dans les différentes salles du château dont les beaux parquets sont tous différents. Nous admirons le salon de chasse, le vestibule où sont représentés tous les descendants de la famille et la salle à manger des trophées.
Au sous-sol se trouve une magnifique cuisine aux voutes de briques et de pierres de taille avec sa superbe cheminée.
La cuisine
La cuisine
Nous verrons ensuite la chapelle où dans la crypte repose presque toute la famille de Chambray.
Mme Raimbourg nous invite pour terminer au potager du château lieu d’animations périodiques.
Nous prenons congé en remerciant Isabelle Raimbourg et partons déjeuner à Conches au restaurant « Le Donjon ».
Après-déjeuner nous nous divisons en deux groupes de 23 pour aller visiter le musée du verre François Décorchemont, dans ses nouveaux locaux (l’ancien hospice de Conches rénové).
Ce sont 500 m2 d’exposition dédiés au verre du XIXème à nos jours et Anaïs notre guide conférencière va nous faire parcourir les différentes salles.
Au premier étage nous voyons les collections « Art Nouveau » (représentations naturelles de fleurs et d’arbres) et « Art Déco » (plus stylisé, plus géométrique de l’entre deux guerres).
Ces collections mettent à l’honneur les productions des Manufactures verrières (Gallé, Daum, Muller, Legras, Loetz) et les créations d’artistes artisans (Broccard, Reyen, Marinot, Colotte)
La pâte de verre est majoritairement représentée par François Décorchemont, maître verrier à Conches et par la Manufacture de verre des frères Schneider (Charles le créateur et Ernest le commercial).
Vitrail « Notre Dame de la vie intérieure » Peugniez (1931) et Sculpture « poisson nageant » F. Décorchemont (1958)
Sont également abordés :
• Les Verreries du Sud (Biot, Dieulefit, Vallauris)
• Les verres contemporains issus des Cristalleries françaises
• La sculpture sur verre
Verreries de Biot et Sculpture sur verre
Une exposition temporaire sur les amphores ainsi qu’une boutique auront permis au deuxième groupe de patienter pendant la visite du premier.
Exposition sur les amphores
Nous sommes légèrement en retard pour nous rendre sur notre dernier lieu de visite le Château d’Hellenvilliers à Grandvilliers.
Les propriétaires Monsieur et Madame de La Porte du Theil nous accueillent fort cordialement malgré notre retard.
L’arrivée au château
Devant ce beau château classé nous pourrions imaginer qu’il date du XVIIème. Cependant le propriétaire nous explique que cette cohérence n’est qu’apparente puisqu’il est en fait constitué de quatre parties édifiées à des siècles différents.
• La chapelle date du XVème
• L’aile gauche du XVIème
• La façade avec sa galerie ancrée sur l’ancienne poterne chartrier du XVIIème.
• La dernière aile en retour date du XVIIIème.
Dès le IXème siècle existe une motte féodale « Hederland Villare » mais jusqu’au XVème siècle on n’en sait pas beaucoup plus. Monsieur de La Porte du Theil évoque devant nous deux faits historiques s’étant déroulés au château.
• L’ancien chef chouan Frotte avant son arrestation à Alençon fit boire ses chevaux dans le bassin toujours visible.
• Henri IV dormit ici avant la bataille d’Ivry.
En 1690 le château est vendu à la famille d’Erard (marquis de Rai) dont Madame est une descendante.
Le château a plutôt bien traversé l’époque révolutionnaire.
Après ce rappel historique un premier groupe va débuter la visite par la Chapelle tandis que Madame conduit l’autre groupe à l’intérieur du château.
La chapelle dont la voûte a brulé en 1802 et a été redécorée au XIXème. Dédiée à Saint Gilles dont nous pouvons voir la statue avec sa biche, elle est toujours consacrée. D’autres statues ont été récupérées de l’église du village .Celle-ci qui s’étant retrouvée isolée une fois tout le village rasé après la peste noire.
Le joli vitrail du fond est XIXème ; les autres vitraux plus modernes ont une histoire. Le maître verrier qui avait réalisé deux d’entre eux commençait sa carrière. Dernièrement on le chercha pour faire les deux autres et avec eux il termina sa carrière.
Quatre tableaux du chemin de croix, achetés à Drouot, décorent magnifiquement le mur auquel fait face le joli tableau d’une vierge à l’enfant.
On peut admirer des « rageurs » dans la gueule desquels pénètrent les poutres semblant leur faire « rendre gorge ».
Le clocheton est XIXème sur un modèle gothique du XVème.
Sur la façade XVIème les meneaux des fenêtres ont été sciés ce qui a un temps déstabilisé l’édifice obligeant à la pose de tirants.
La jolie porte d’entrée est d’inspiration italienne sur un carton de 1540. Elle a été ensuite réalisée par des tailleurs de pierre locaux puis plaquée contre la façade.
Nous pénétrons dans le château vers la galerie à droite où depuis sa construction elle a été séparée en trois salles.
• Le grand salon avec ses nombreux portraits au mur
• La salle à manger qui ne sert qu’occasionnellement
• Et un dernier salon
Revenant sur nos pas nous voyons la cuisine qui est l’une des pièces de vie des propriétaires : une très belle table rustique, une jolie table à pilon, et une grande pierre à évier avec sa pompe pour amener l’eau d’une citerne extérieure.
Nous sortons dans la cour renaissance dans laquelle se répartissaient les services (bûcher, buanderie…) et nous y admirons une belle tour ronde avec sa frise très travaillée.
Nous contournons cette tour pour voir l’autre face de la galerie. Un cadran solaire figure sur ce mur.
Nous remarquons un très bel hêtre pourpre et nous admirons la vue sur le parc en patte d’oie avec ses belles allées, replantées après la tempête de 1999.
En revenant vers l’aile XVIIIème nous admirons un magnifique séquoia.
Il est déjà tard mais ne voulant pas déroger à notre traditionnel goûter, nous remercions Monsieur et Madame de La Porte du Theil pour toutes leurs explications fortes intéressantes et les invitons au « pot de l’Amitié ».
M. et Mme de La Porte du Theil avec les Amis de L’Aigle devant le château