Sortie du 26 juin 2022 : Les Manoirs du Perche

Nous sommes 48 participants à monter dans le car pour cette sortie dans le Perche. Le soleil est au rendez-vous.
Le chauffeur nous amène à notre première étape le château de la Guimandière à la Poterie du Perche. Situé sur la RN 12 entre Verneuil et la Ventrouze, ce site était autrefois en limite du Duché de Normandie et du Royaume de France.

Château de La Guimandière

A l’extinction de la famille Rotrou en 1226, le Perche tombe entre les mains du Roi de France. A la Guimandière arrive la famille Tourneboeuf, anoblie dont les armes (trois têtes de bœufs) figurent dans la chapelle.
Durant la guerre de cent ans (1337 -1453), la noblesse percheronne est anéantie lors des combats. A la fin de cette guerre la bourgeoisie urbaine noue des alliances matrimoniales avec les descendants de l’ancienne noblesse militaire. Près de 400 manoirs sont alors construits dans le Perche dès le XVème siècle.

En 1578, François de La Vove (dont les lettres F et V apparaissent sur le panneau d’une lucarne) fait construire un petit manoir de style rustique percheron avec un corps de logis et une tour ronde dans laquelle se trouve un bel escalier XVIème. Il fera également construire une glacière. Cette famille s’éteint vers 1760. Hypothéqué et à l’abandon pendant 10 ans le manoir est racheté par le marquis de La Porte de Riantz. Il va l’agrandir en lui adjoignant une façade en équerre déterminant sa dimension actuelle le transformant en château.
Au XIXème Alexis le Venneur de Tillières en hérite. En 1867 il le restaure en profondeur dans le style anglo-normand. Il remanie la façade, rehausse la toiture y fait poser des ardoises (plus élégant que la tuile). Il ajoute au 3ème niveau 5 lucarnes chacune encadrée par des pointes de dentelles de briques, le tout supprimé depuis.
Jacques –François marquis de Chambray hérite de la Guimandière et y établit son équipage de chasse à courre. Il meurt en1910 et le château échoit alors à l’un de ses amis Monsieur de La Palme avant d’être repris en 1954 par la famille Baggio qui occupe toujours le domaine.
Tel que se présente à nos yeux le château c’est un beau bâtiment avec dans sa partie gauche les restes du manoir XVème et perpendiculairement l’aile ajoutée au XVIIIème se terminant par une tour datant du XIXème. Monsieur Baggio nous la fait contourner pour accéder à la façade arrière où le crépi simule un appareillage de briques. Au milieu de la façade se trouve une tour carré surmontée d’un clocheton. A l’extrémité se trouve la chapelle décorée d’un superbe appareillage de briques et flanquée de deux échauguettes.

La chapelle de la Guimandière

La glacière, toujours en état, se situe dans une belle tour ronde. Son plafond présente une demi-sphère parfaite taillée dans du calcaire d’Autheuil (à 6 km).
Les blocs de glace étaient précipités dans la glacière dont le fond et les parois étaient recouverts de paille.

A l’issue de ce « tour du propriétaire », n’ayant pas trouvé de café pour accueillir notre groupe, nous faisons la pause-café à la Guimandière avec M.Baggio.
Nous remercions chaleureusement M.Baggio pour sa disponibilité, la présentation de ses documents illustrant ses commentaires sur l’histoire du château et de la région.

Nous reprenons la route en direction de Corbon où se situe le Manoir de la Vove.

Le propriétaire Monsieur Couvelaire nous accueille et nous offre l’accès à la cour.
Nous sommes face à l’un des plus beaux manoirs du Perche, un exemple très remarquable de « pourpris » : quadrilatère fortifié ceint de murs à l’intérieur duquel se dresse le logis

Manoir de la Vove

Le donjon, élément le plus ancien date du XIVème, vestige de la place forte intérieure, remanié au XVIème et percé de fenêtres.
La tour octogonale du XVème, légèrement plus haute que le donjon, loge un admirable escalier à vis hélicoïdal. Cette tour est flanquée de la traditionnelle tourelle cylindrique en encorbellement. La porte d’accès est ornée d’un encadrement flamboyant de choux frisés.
Nous faisons le tour du manoir avec le propriétaire et son chien.
Nous admirons le corps de logis XVème qui jouxte le donjon et la tour. Une longue aile du XVIIème, inachevée, s’étend en équerre.

Aile du XVIIème, perpendiculaire au corps du logis

Un peu d’histoire :
Les seigneurs de la Vove étaient parmi les plus puissants du Perche. Pierre de la Vove épouse en 1456 Michelle de Tourneboeuf (familles citées lors de la visite de la Guimandière.)
Marie de la Vove dernière descendante épouse le marquis de Langan. C’est lui qui fit construire la grande d’aile à deux étages puis il mit le manoir en vente. Le manoir aura était conservé par la famille de la Vove jusqu’en 1765.
Une veuve accusée de cacher des chouans provoqua la vente de la Vove comme bien d’émigrés.
Le domaine fragmenté devient une ferme où les arbres sont coupés. C’est le professeur Couvelaire qui en 1970 achète le Manoir en très mauvais état avec seulement 5 hectares de terre. Avec passion, il consacrera sa vie avec ses fils à lui redonner sa splendeur et à reconstituer le domaine en reboisant et en rachetant des terres.

Nous remercions le propriétaire et nous dirigeons vers la Chapelle Montligeon pour le repas «Au Montligeon».

A 15h nous avons rendez-vous au sud-est de Bellême au château des Feugerets.

Le château des Feugerets

Le château, IMSH, a été racheté en 2018 par un jeune propriétaire Monsieur Fautrelle de Fondaumière qui l’a récemment ouvert à la visite après l’avoir remeublé.
Monsieur de Fautrelle de Fondaumière nous accueille au pied du château et nous présente l’historique, l’agencement et l’architecture de ce domaine.

Fief du gouverneur de Bellême, ce château construit entre 1550 et 1570, en hauteur, bien visible de la route reprend les éléments d’un château médiéval préexistant. Le donjon de 1500 et la grosse tour dite de la Barbe à usage de colombier en sont les vestiges principaux ainsi qu’une tourelle avec canonnière. Entouré de douves sèches (fosses de défense) on imagine la vocation défensive de ce premier château.
Au pied du château se situe la «basse-cour» où deux pavillons XVIème couverts de tuiles (l’ardoise plus noble étant réservée au château) servaient de dépendances.
Depuis la basse-cour par un escalier en fer à cheval à nous accédons à la terrasse. Cette terrasse à balustres créée postérieurement donne une superbe vue sur les alentours.

Terrasse à balustres à l’entrée du château

Au XIXème le château est remanié dans le style troubadour à la demande du marquis de Broc. Il transforme par exemple cinq lucarnes en fenêtres à meneaux.

Sur l’autre façade on voit les armes des Feugerets (fougères et couronne de marquis). Le domaine sera érigé en marquisat sous Louis XIV et Aimery des Feugerets, maître des chasses, peut s’enorgueillir d’avoir reçu à plusieurs reprises le grand dauphin fils de Louis XIV. Sur cette façade on note une avancée arrondi aux ardoises taillées en écailles.

La façade arrière du château

Par mariage le château passe des Feugerets à la famille de Semallé puis au XIXème au de Broc puis au de Romanet.
Le propriétaire et une guide nous accompagnent pour la visite intérieure. Nous entrons dans le château par un premier salon, cabinet de curiosités où trônent du marquis de Broc. En enfilade un deuxième salon de 75m2 aux boiseries bleues de chine d’époque Louis XVI, puis la salle à manger avec ses tomettes 15×15 aux motifs rouges et noirs, ses boiseries Louis XV et son poêle alsacien. Nous traversons le vestibule d’honneur et passons par le corridor des trophées.
A l’étage le propriétaire nous montre le plan terrier de 1660 au mur de la galerie.
Le jardin à la française avec ses pièces d’eau, ses bosquets, connu par ce plan terrier est remplacé à cette même époque par un jardin à l’anglaise complété par une orangerie. De beaux arbres datent de cette période.
Après une promenade dans le Parc nous terminons cette visite par la tour de l’abbé : Oratoire qui constituait la chambre de l’abbé qui vivait de façon permanente au château comme précepteur et confesseur.

Monsieur Fautrelle de Fondaumière
nous présentant la façade arrière du château

Nous remercions le propriétaire pour cette visite commentée de ce très beau domaine et nous reprenons le car pour Nocé.

A Nocé, au Manoir de Lormarin nous sommes accueillis par son propriétaire Monsieur Alban Cristin. Il nous explique l’origine du nom du Manoir, nous décline les différents propriétaires et nous propose la chronologie de la construction.

Manoir de Lormarin

En 1565 Jean-René de la Bretonnière, hérite d’une terre sur laquelle il fait édifier un premier manoir avec deux tours dans la diagonale, ce proclamant alors Sieur de Lormarin. Il épouse ensuite Anne Gravelle qui a déjà deux enfants. Ils en auront deux autres et il faut alors agrandir la demeure tout en se protégeant des dangers de l’époque. A ce jour subsiste le pourpris (cour fermée et bâtiments agricoles) ainsi que vingt-huit éléments défensifs (meurtrières pour tirer à l’arbalète ou à l’arquebuse).
La sobriété du décor extérieur peut s’expliquer par leur religion protestante.
A l’époque l’habitat était partagé entre le propriétaire et son fermier : le propriétaire au premier, le fermier au rez-de-chaussée.
Ce fut ensuite Jacques Tascher de la Pagerie (lointain cousin de Joséphine, épouse de Bonaparte) qui fut Sieur de Lormarin. En 1662 il vend Lormarin aux Turpin. Pierre-Philippe le modernise dans le goût du XVIIème.
En 1685 à la révocation de l’Edit de Nantes les tracasseries reprennent contre les protestants. Pierre-Philippe de Turpin décède en 1701 et le manoir échoit à Louise Esther Turpin mariée à André de Barville, seigneur de Nocé. Le Manoir est alors luxueusement meublé, pourvu d’une belle bibliothèque mais toutes les archives de cette époque ont disparu.
A la Révolution Louis de Barville, le petit-fils émigre. Le Manoir est saisi et vendu à Michel Branchard. A la mort de sa veuve Monsieur de Mesenge en hérite et c’est son fils qui revendra Lormarin en 1846 à leur fermier Monsieur Cheret, puis le manoir est acquis par Monsieur et Madame Cristin en 1998.
Depuis Monsieur et Madame Cristin n’ont de cesse de continuer l’embellissement de ce beau domaine, par eux-mêmes.
Nous les remercions chaleureusement pour leur accueil, leur disponibilité et les explications
si intéressantes de M.Cristin.

Monsieur Cristin avec le groupe des Amis de L’Aigle devant le Manoir