En raison d’élections, nous avons décalé l’heure de départ de notre sortie. Aussi ce n’est qu’à 9h30 que nous quittons l’Aigle en car direction Médavy (pas de pause-café non plus exceptionnellement).


Le Château de Médavy


 Nous sommes accueillis à la grille par Madame Ilien qui sera notre guide. Nous sommes 34 participants, elle nous répartit en deux groupes : l’un fera le tour des extérieurs tandis que l’autre visitera l’intérieur du château.

Dès le XIIème siècle, place forte du duché de Normandie, Médavy sera rebâti à plusieurs reprises. La famille Rouxel le possède de 1460 à 1728.

Pierre Rouxel (1562-1617) embrasse le parti de la ligue pendant les guerres de religion et, pour ses loyaux services, Henri IV érigera Médavy en baronnie en 1596. Après avoir détourné l’Orne pour alimenter les douves, ce même Pierre Rouxel rebâtit un château avec 4 tours d’angle dont seules deux tours sud sont encore visibles aujourd’hui : la tour St Pierre dédiée à des expositions et la tour St Jean ou chapelle.

Deux Rouxel deviendront maréchaux de France : Jacques (1603-1680) pour s’être illustré pendant la guerre de 30 ans et son petit fils Jacques Léonor (1655-1725) pendant la guerre de succession d’Espagne. Celui-ci rebâtit un nouveau château sur les plans de Robert de Cottes et avec Pierre le Mousseaux pour la construction. Il conserve toutefois une partie des fondations et des murs du précédent. En 1733, ses héritiers vendent le château au duc de Tallard qui le revend en 1754 à Pierre Thiroux de Monregard, intendant des postes et relais. Il y fait bâtir le pigeonnier et de 1760 à 1774, il va moderniser le château et créer un parc à la française. En 1769 Médavy est érigé en comté.

A la révolution le comte de Médavy émigre. Son château est mis sous séquestre jusqu’en 1806 et le mobilier est dispersé. A leur retour, le comte de Monregard rase une partie du château.

En 1820 il vend le tout à Madame Labbey de la Roque (petite fille du général Leveneur de Carrouges). A la mort de celle-ci, le château échoit à son neveu le comte de Tertu puis à sa fille la Comtesse de Maussion.

Les Maussion refont les toitures en perçant en façade des fenêtres plein cintre pour éclairer les combles.

Médavy est revendu en 1919 à Henri de Peyerimhoff qui y réside périodiquement jusqu’en 1953. Puis le comte de Gracey qui le revend en 1975 à Maurice Rey éleveur de chevaux qui l’ouvre au public. Médavy est classé MH dès 1989. Revendu à Monsieur et Madame Charron qui l’ont remeublé et y résident depuis.

A l’extérieur, quelques marches nous donnent accès à la chapelle qui présente un autel en pierre entouré d’un joli décor de statues et surmonté d’un fronton. On peut également remarquer quelques magnifiques statues en bois.


A l’intérieur, nous entrons dans un très beau hall où l’on peut admirer le traineau du comte Orloff, une chaise à porteur et deux figures de proue. Suit un magnifique escalier d’honneur, éclairé de fenêtres et au palier duquel se trouve un magnifique buffet quatre portes.

A l‘étage nous traversons une salle à manger d’apparat où la table est dressée avec une vaisselle en porcelaine de Chine, un petit salon chinois avec ses chinoiseries XIXème au-dessus des portes.

On y trouve six fauteuils estampillés Jacob, recouverts de tapisseries d’Aubusson avec pour thème les fables de La Fontaine. Enfin un grand salon, traversant où l’on voit des deux côtés les grandes allées du parc face aux balcons. Il présente un magnifique parquet en rayons de roue en poirier et citronnier. Dans un autre salon de très beaux globes terrestres et célestes sont présentés. Arpentant ces pièces nous avons également pu admirer une très belle armoire Boulle, un régulateur de parquet tchèque, deux somptueux cabinets et plusieurs magnifiques tableaux.

Nous remercions notre guide et partons déjeuner au restaurant du parc à Rânes qui se situe tout à côté du château éponyme. La mairie y est installée entourée d’un beau parc.

Après le repas nous devons poursuivre en direction d’Ecouché où monsieur Hervé, greeter (autochtone bénévole, connaisseur et passionné de l’histoire de son village) nous attend pour une traversée commentée des rues et ruelles de la cité eucubéenne.


Le village d’Ecouché

Longtemps connue pour ses activités drapières, de production de chaux et de minoterie, Ecouché (1390 habitants) labellisée petite cité de caractère, est toujours un arrêt pour les pèlerins du Mont Saint Michel.

Castrum (cité fortifiée) au XIème siècle, il n’en reste que la venelle de la motte de nos jours. Occupée par les anglais en 1445, ils seront expulsés cinq ans plus tard par Charles VII. En 1589, après les guerres de religion, Henri IV reconquiert les villes de basse Normandie.

Le 6 Juin 1944, tout fut détruit le long de la voie ferrée. Telles sont en quelques phrases les grosses lignes historiques d’Ecouché que nous brosse Monsieur Hervé.

Au cours de notre déambulation, nous allons découvrir le réel intérêt architectural et historique de la cité. De hauts murs bordent les jardins et les ruelles pour préserver l’intimité de la vie de leurs propriétaires. Il faudra souvent se hausser sur la pointe des pieds pour apercevoir une jolie tour médiévale côté jardin. Il en reste encore 16 mais la plupart sont privées et donc peu visibles. Nous avons pu voir la tour coiffée dans le centre du bourg ainsi que la tour ronde de la cour du pot d’étain.

Baronnie, Ecouché relevait des pratiques féodales pour la justice et l’administration puis, devenant ville bourgeoise, elle s’affranchit des redevances féodales par exemple la rente au seigneur, le cens sur l’héritage ou l’entretien des moulins. Il ne reste plus à Ecouché de maisons en bois comme on les construisait au XII ou XIIIème siècle. La pierre calcaire et la chaux se trouvant sur place, on construit très vite en pierre.

Au rez-de-chaussée, sur la rue ce sont une ou deux boutiques voire une échoppe d’artisan. Dans la cour derrière la tour escalier qui desservait une ou deux maisons. Le bourgeois vivait au premier, les pauvres au niveau du sol en terre battue dans l’humidité permanente. Tout en échangeant nous arrivons bientôt place de juillet où se trouve l’autel républicain. Au culte catholique, les révolutionnaires tentent de substituer le culte de le Raison et ils y affectent certaines églises. Parallèlement, des particuliers érigent des autels privés dits décadaires car les cérémonies s’y déroulaient le décadi (dernier jour de la semaine de 10 jours).On y proclamait les lois et les circulaires officielles en exaltant le civisme, les progrès de la science ou de l’agriculture. Cet autel est le seul de l’Orne. Sur le linteau sculpté en bas-relief, on reconnait le bonnet phrygien symbole de la liberté sous la révolution.

Le bonnet phrygien de l’hôtel révolutionnaire


Quelques rues plus bas se trouve l’église Notre Dame d’Ecouché, assez atypique : ce sont trois églises en une. L’église primitive dont il ne reste qu’un pan de mur d’une tour carrée, la seconde du XIIème siècle de style gothique qui perdura jusqu’en 1920. Sa toiture est alors détruite pour raisons de sécurité. Les arcades qui restent, en ruines du XVème siècle et en forme de parvis, confèrent une originalité à l’ensemble actuel. Enfin la troisième église du XVème siècle n’est toujours pas achevée un siècle plus tard. Seuls sont terminés la croisée du transept et l’amorce d’une nouvelle nef. Le clocher, massif de style renaissance porte trois cloches.

Nous terminerons notre promenade près de la maison de retraite médicalisée à la sortie du bourg là où fut construit en 1336 un hôtel dieu pour accueillir les miséreux de la paroisse. Les bourgeois qui se dévouèrent à leur service s’appelaient «  frères condonnés », remplacés en 1666 par deux femmes nommées à vie qui tenaient en même temps deux écoles destinées aux enfants pauvres. Pendant la révolution, la chapelle de l’hôtel dieu, désaffectée, sert de garnison à la garde nationale sédentaire ; le reste de l’hôtel dieu devient hospice civil.

En 1809, la gestion est municipalisée et les hospitalières, sans être religieuses passent sous l’autorité de l’évêque de Sées. A la fin du XIXème, elles sont remplacées par des sœurs le plus souvent de la Providence qui elles même le seront un siècle après par des professionnels de santé.

Les bâtiments ont été reconstruits par le Docteur Léon Latté de 1914 à 1933 et ils ont encore été modernisés par la suite.

Sous le charme de cette citée qui nous a été contée, nous remercions notre guide qui selon ses dires aurait pu nous proposer une visite encore plus approfondie.

Nous reprenons le car pour Aubry en Exmes. Face à ce château tour peu commun, nous faisons une pause assez rapide mais intéressante.

Il existe un autre bâtiment à l’arrière du premier avec une petite tour circulaire, d’architecture plus classique. Ce site devrait prochainement être restauré.

Le château tour d’Aubry en Exmes


Le temps de revenir au car, nous sommes en retard pour notre dernière visite au Manoir d’ Argentelles où nous prions Monsieur Dumesnil du Buisson de bien vouloir nous en excuser. Il nous accueille devant son manoir.


Le Manoir d’Argentelles

Le Manoir d’Argentelles


Nous admirons cet étonnant édifice renaissance à tourelles d’angles avec sa belle tour hexagonale en façade et colombages en partie haute. Nous restons à l’extérieur tandis que Monsieur Dumesnil du Buisson nous trace l’historique.

Bâti en 1410 pendant la guerre de cent ans par Guillot d’Ouilly, officier du roi de France, il constituait alors un poste avancé de défense pour le château fort et la ville d’Exmes mais, le manoir et sa garnison ne furent jamais attaqués. Henri IV y est venu en1591 pour signer l’ordre de démantèlement de la forteresse d’Exmes.

Au milieu du XVIIIème siècle le manoir est acquis par le Comte de Flers et reste jusqu’en 1880 à ses descendants. S’ensuivit après une longue période d’oubli où il commence à tomber en ruines. Le sieur Marchand à qui il appartient alors est peu soucieux du patrimoine. Il vendit à des antiquaires les épis de faîtage des tourelles, les grilles des fenêtres et des portes sculptées à panneaux gothique flamboyant.

En 1957 il est sauvé de la destruction par le Comte Robert Dumesnil du BuIsson qui débute sa restauration. Cet homme était le grand père de l’actuel propriétaire ; c’était un grand érudit et un archéologue célèbre.

En 1960 Argentelles n’a plus que quelques pans de murs entourés d’un champ de ronces. Les travaux dureront de 1965 à 1974. Le manoir est classé MH en 1966.

En1967, cette restauration fut primée par « Chefs d’œuvres en péril ». Des photos aux différents stades de cette restauration et d’anciennes gravures sont présentées dans une grande salle. Chaque salle du rez-de-chaussée présente une cheminée monumentale.

Le propriétaire actuel, le Comte Laurent Dumesnil du Buisson, a également mené des travaux sur une douzaine d’années mais, le manque de grandes ouvertures et donc de lumière ne l’incitent pas à vivre là en permanence.

La restauration de ce manoir à l’identique est vraiment une belle réussite. Nos participants sont enchantés et remercient chaleureusement Monsieur Dumesnil du Buisson pour toutes ses explications. Nous le convions à notre traditionnel goûter pour clore cette journée avant de reprendre la route du retour.

————————————————————- Marie- Christine GEISMAR

La photo du groupe des participants